Denis, de Lui à Moi.
« La liberté, c'est de n'arriver jamais à l'heure. »
Ubu, monarque pas poli.
Inutile de se leurrer, je passe à l'heure d'été.
Des envies de prendre du leste, de raccourcis et de velléités.
Me jouer du prestige, coudre à blanc fil un gros pompon grossier.
De noircir, exclusivement, que des pages de mots fléchés.
Des envies faciles de faciles paresses, de siestes, de saisir, là, l'ombre des lauriers, à en lâcher ma proie, à s'en émousser les sens, à en confondre même, l'ambition, de la médiocrité.
Comment ça, dirait-eLle - pour me faire parler (c'est pugnace, mais ça joue les innocentes, à l'inverse de moi) - alors comme ça, y'aurait donc médiocrité et médiocrités ? Médiocrité et médiocrités. Oui, je peux commencer par m'expliquer la-dessus, par la fin, comme il est d'usage d'aborder la philo.
Pasquattention, précision pas nécessairement superflue - tout le monde connait pas le truc - la philo, y'a rien de plus simple, dès lors qu'on sait qu'il suffit juste de commencer par la fin. Je démonstration par un Kantique des cantiques de bac philo :
L'esprit est-il un jouet pour le corps ? Tiens, bonne question, qu'on peut retourner pour la forme ( genre la douleur n'est qu'une information ), puis qu'est-ce que l'esprit ? Qu'est ce que le corps ? Dualité ou monisme ? Tout ça sans manquer d'interroger un ramassis de vieillards ergotants - des "autorités" qui nous permettront de s'arroger en "autorité", en se torchant de leur barbe, si on ajoute une subtilité à un des ces quelconques vieux ressassements, des toges helléniques jusqu'au zinc des Deux-Magots. On envoie le point d'interrogation se rhabiller, on obtient la conclusion en question, par laquelle donc mieux vaut commencer avant de remonter saumoniquement le raisonnement.
Ce que je crois, c'est que les petites réflexions vicieuses ont jamais leur compte de va-et-vient, qu'on leur fasse gentlement la cour par étapes du début jusqu'à qui veut la fin, ou qu'on leur mette direct la main au cul en remontant vers leurs plus hauts desseins.
Si je les ai vicieuses ? Oui, assurément.
Alors, retarder le vif du sujet pour la Morte Mémoire - indice pour bigleux Watson, je viens de te le vendre tout cuit le sujet, t'as noté ? Ben non, évidement, on me donne du Sibylle, me cause jus de boudin, alors qu'on passe en touriste, tout en lorgnant vers une autre fenêtre, en alerte juste pour l'appel, sinon on se retrouve au café, quand tu causes, on y comprends goutte. Vraiment, des fois, je me demande ce que je peux bien trouver aux cancres et aux puceaux...
Le sujet tout cuit donc, avant atermoiement, ce sont ces Mémoires à vif qui atermoient mon sujet, bien partant pour lui régler, en solde, son compte. Toujours rien pigé ?
Médiocrité et médiocrités donc, merci pour le S salvateur, je reprends, en maître-es-Mé-Mo, tant pis pour qui somnole auprès du radiateur, mon bureau reste ouvert, s'ils ont des questions, juste qu'ils ne viennent pas se plaindre, s'il ont pigé dalle-que-zéro-pointé à mes petits magistres-maux.
Petite compo de vacances, pour couper un peu cette flemme qui m'alanguit ( depuis feux-Pan !, je sieste de pages en pages, de draps en draps, la coulante sonne imperturbablement 14h. à mon été ), une compo comme en philo, donc - longtemps, j'ai été de ces gamins inquiétants qui finissent leurs cahiers de vacances le 2 juillet, pas pour être débarrassés mais pasque ça me manquait l'école et ses T.B au feutre rouge, alors m'auto-évaluer et ce plaisir lubrique à retourner la page et voir qu'on a tout bon... Cétait clair, lumineux, les contrôles, c'étaient pas comme les gens. En gens, je touchais pas la moyenne, pis j'ai guère progressé ( j'élitise, maintenant, je vise que le haut de mon panier ), pasqu'on peut pas les retourner, les gens, pour savoir si on a bon, faut les foutre à poil, toussa, ça prend du temps, alors je leur préfère encore parfois les mots fléchès ( d'ailleurs, même quand on s'applique, on est jamais vraiment sur, un peu comme avec ces mots fléchés vicelards qui se prennent pour des gens et à la fin tu t'aperçois que la réponse est dans le prochain numéro ( qu'immanquablement, t'achètes pas, pasque mémé aime pas trop qu'on la pousse sur la temporisation )).
Sauf que bon, ensuite, on devient populaire, la philo, on l'apprend toute seule au café quand les copains, eux, sèchent pas, même si on s'en carre total à ce moment là, on cherche plus à comprendre et, de toute façon, on a toujours tout bon, et on s'aperçoit qu'on peut les retourner facilement les gens, même que ça a un nom, de la manipulation, ça s'appelle, et que c'est bien plus jouissif que les contrôles, le contrôle ; on vire paresseuse et vicelarde, et on a toujours tout bon - puisqu'on est populaire, et qu'on peut même faire exprès de se tromper, comme ça pour le plaisir ( genre en imposant vicieusement les pires fautes de goût, le menton rogueblard, pour voir fleurir son bahut d'imprimé léopard et de pattes deffes même pas volés à leur mère), juste pour railler ensuite toutes ces brebis qui suivent nos flèches en attendant que notre langue feutrée leur accorde un T.B d'assentiment.
Médiocrité et médiocrités. Mine de, on se rapproche, le sujet a toujours flirté plus ou moins habilement entre les deux. On soigne les secondes pour atteindre la première, bien que les cahiers de vacances, la misanthro-miopie, la paresse des vieux et des présents lauriers, la merlie se moquant des grives, la perversité polymorphe, et autres maladies infantiles, ont toujours leurs bénignes rechutes et leurs célères montées de fièvre.
Hier, tu te piquais d'exceller, le lendemain peut-mieux-faire. Médiocrité et médiocrités. Dominer ici pour mieux végèter là. Tentant. Un doux labeur pour acquérir estime, entre deux méridiennes à s'enquèrir du succès. Comme ceux-là, toujours entre deux ouvrages, ni vraiment fait, ni vraiment à faire.
Il y a une semaine, fantaisie m'a pris de reprendre mon roman ( poncif ironique volontairement littéraire ). Ma 1ère phrase qui m'avait attendu 26 ans s'est grimée et m'échappe, impossible de la retrouver. Elle me cause comme à une étrangère, ça devrait m'inquièter mais je me démonte pas, je me lance, je cabotine, je ris à mes propres mots, je vais pour pisser, je me relis, songe à quel mauvais calembour pour le titre et soudain, je me souviens que j'écris pas pour Mé-Mo.
Mon plan est dans un carton à Bonsergent, mes mots-valises à la consigne, ou ai-je pu mettre mes chaussures de valse ( 1-2-3, le rythme, on avait dit, c'est ça, ça te revient ), mon d.d est toujours vide, j'ai que le blog sous la main pour office de mémoire, et là-bas, c'est le boxon, y'a tout à réagencer, un espace de travail, ça s'improvise pas à la marge, j'en perds mes je, mes tu, mon propos et mes moyens et je me regarde écrire, auréolée des relatifs succès de mes médiocrités. Sans offense, sans fatuité, j'ai l'ambition de croire que je peux mieux faire que ce que je sers dans ce bouge qui me sert d'atelier. De la littérature plastique, pas de l'artisanat, un roman à proser plutôt que des proèmes à chanter, le pire du bon, le meilleur du mauvais, ça me revient, ça se compose, ça ne s'improvise pas.
On parle, on parle et la philo dans tout ça ? Ah oui. Bah, c'est simple : ouvrir le dico ; confronter les sens ; inventer des mots pour faire croire qu'on invente un concept ; embrouiller une conclusion évidente sous des pages de mots compliqués juxtaposés... Ou tu te contentes de suivre et par là que " tu penses ". Ou encore, manipule le sens des mots, c'est moins risqué qu'avec les gens, et tu pourras peut-être pondre un roman. Mieux, prends-toi plutôt des mots fléchés, après tout, c'est les vacances.
C'est l'été, les kermesses sont passées, les clients à la plage, ma retraite passera pour une sieste, mes siestes pour crapuleuses, et les crapuleries laissent quelques répits à l'ombre des persiennes.
Inutile de te leurrer, je passe à l'heure d'été.
J'ai des distances à prendre, l'équilibre à retrouver,
Un amant à apprendre, des siestes pour se flécher,
un peu de leste à prendre sur mes velléités.